Le ton monte entre Samuel Eto’o, le patron de la fédération nationale, et le ministère des sports. La Fecafoot menace d’en appeler à l’arbitrage de la FIFA.
Les supporters des Lions indomptables ont de quoi s’arracher les cheveux. Si l’équipe est à la peine ces dernières années dans les compétitions internationales, c’est loin des pelouses qu’un autre match occupe depuis des semaines le terrain médiatique : celui qui oppose le ministre des sports, Narcisse Mouelle Kombi, à Samuel Eto’o, le président de Fédération camerounaise de football (Fecafoot) depuis décembre 2021, sur la nomination du nouveau sélectionneur et de ses équipes.
L’inimitié entre les deux hommes n’est pas nouvelle, mais elle a pris de l’ampleur depuis l’élection de l’ancien capitaine de la sélection. A l’issue de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) organisée au Cameroun en janvier-février 2022, ce dernier avait obtenu le renvoi – avec l’accord de Paul Biya, le chef de l’Etat – du sélectionneur portugais Antonio Conceiçao, pourtant soutenu par le ministre, pour nommer Rigobert Song, son ancien coéquipier.
En avril, après le parcours décevant des footballeurs camerounais lors de la CAN organisée en Côte d’Ivoire, Narcisse Mouelle Kombi a finalement repris le dessus en désignant le Belge Marc Brys au poste de sélectionneur, entouré d’un staff technique, médical et administratif validé par la présidence de la République. Un crime de lèse-majesté pour Samuel Eto’o.
« Une instrumentalisation de l’institution »
Estimant que la Fecafoot n’avait pas été associée au processus de recrutement du technicien qui relevait de ses prérogatives, l’ancien attaquant du FC Barcelone et de l’Inter Milan avait, dans un premier temps, refusé de valider la désignation de Marc Brys et de l’encadrement choisi par le ministère. Après avoir menacé de nommer son propre sélectionneur, Samuel Eto’o avait finalement fait machine arrière. Mais s’il a reconnu l’entraîneur belge et deux de ses adjoints (Joachim Mununga et Giannis Xilouris), il a contre-attaqué en nommant son propre staff technique, médical et administratif. Un geste considéré comme une nouvelle provocation par son ministère de tutelle.
Saisie par l’Association des clubs de football amateur du Cameroun et la Ligue de football professionnel du Cameroun, la chambre de conciliation et d’arbitrage du Comité national olympique camerounais a décidé, mardi 21 mai, de suspendre le staff technique nommé par la Fecafoot. Mais celle-ci a réagi en concluant, à la surprise générale, que la suspension concernait également Marc Brys.
Suite à cette décision, la fédération a annoncé se réserver le droit de « transmettre ces décisions à la FIFA, qui constituent un frein au processus de préparation des prochains rendez-vous » de l’équipe nationale. Samuel Eto’o a également écrit à Hamad Kalkaba Maboun, le président de la chambre de conciliation et d’arbitrage, afin de dénoncer « une instrumentalisation de l’institution », tout en l’alertant sur « les risques de suspension [par la FIFA] ».
Climat délétère
Mais, d’après Cyrille Tollo, le conseiller technique du ministre des sports Narcisse Mouelle Kombi, « la Fecafoot fait une lecture très personnelle de la décision de la chambre de conciliation et d’arbitrage. Non seulement, c’est le staff nommé par la fédération qui est suspendu, pas celui nommé par le gouvernement le 2 avril, mais le président de la Fecafoot n’a pas le pouvoir de suspendre le sélectionneur et encore moins de le démettre de ses fonctions ».
« J’ai lu et entendu que le président Paul Biya aurait tranché en faveur du staff technique de Samuel Eto’o, mais ce n’est pas le cas. Le président de la République a validé la composition du staff technique, administratif et médical proposée par le ministre des sports, dont tous les membres sont sous contrat avec l’Etat. Les choses sont très claires », poursuit Cyrille Tollo.
Ce climat délétère pèsera-t-il sur les performances des Lions indomptables ? Marc Brys, qui refuse toute sollicitation médiatique à propos de cette nouvelle affaire, a donné rendez-vous à ses joueurs le 2 juin à Yaoundé. Le sélectionneur, qui n’a toujours pas rencontré Samuel Eto’o, a communiqué le 10 mai la liste des joueurs convoqués pour affronter le 8 juin le Cap-Vert, puis l’Angola le 11 juin, lors des 3e et 4e journées des qualifications pour la Coupe du monde 2026.